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Mylène Farmer s’inquiète de l'état du monde : « une période vraiment effrayante »

Des confidences rares à la presse qui n'ont jamais autant renvoyer à l'actualité.

Interview de la chanteuse dans Le Parisien, d'où est extraite notre illustration. Un entretien enrichissant mené par le journaliste Éric Bureau, quelques heures avant la sortie du fameux documentaire sur la star.

Ils se saluent : les deux poings se percutent doucement. Mylène remarque qu'ils ont tous les deux une bague à tête de mort. La sienne est plus grosse. Chacun sourit sous son masque. La chanteuse préfère garder le sien, « ça l'arrange ». Pour un premier tête-à-tête avec Mylène Farmer, ils auraient préféré que le coronavirus ne s'invite pas à leur table. Plus de vingt ans que Le Parisien - Aujourd'hui en France n'a pas interviewé Mylène ! L'entretien dure une heure et demi. 

Elle parle de Jean-Paul Gaulthier et Sting avec admiration et tendresse. 

On peut aisément supposer que Mylène continuera l'écriture de chansons et sans doute à travailler sur les musiques. La scène ? « Dieu seul le sait » ! Nous pouvons en déduire qu'elle reviendra en concert si la santé ne lui fait pas défaut. Nous espérons que cette nouvelle à demi mots rassurera peut-être les plus pessimistes.

On voit aussi que l'artiste est très inquiète sur l'état du monde par rapport au coronavirus, mais pas seulement. La crise sanitaire majeure que nous traversons réveille les spectres apocalyptiques dont on se passerait bien. Le désenchantement sociétal, le renoncement aux fondamentaux et la violence, en progression notoire, sont également des constantes la préoccupant. Elle a d'ailleurs pu les évoquer lors d'interviews précédents.

Morceaux choisis classés dans l’ordre des questions de l'entretien :

Ce documentaire est à l'image de votre spectacle hors normes. Pourquoi montrer l'envers du décor ?

« Parce que c'était naturellement le bon moment pour moi. Je voulais fixer sur la pellicule tous les instants magiques partagés et offrir à celles et ceux qui me suivent depuis longtemps des instants plus intimes. »

Vous n'avez plus peur d'être abandonnée par qui ? Une personne, votre public ?

« Cela me renvoie à un cauchemar récurrent. J'arrive en scène et la salle est vide. La peur viscérale de l'abandon existe chez moi depuis l'enfance. »

Vous parlez plusieurs fois de l'amour avec votre public, qui donne un sens à votre vie. Que feriez-vous si vous n'étiez pas artiste ?

« C'est difficile de répondre. Cet échange avec le public est tellement vital. Dans une autre vie, je pense que mon amour des animaux l'emporterait. Idéalement, je serais à la fois vétérinaire et refuge. »

Dans le film, vous dites avoir acquis une nouvelle forme de liberté...

« Cette ultime désobéissance est avant tout une désobéissance à soi-même, une envie de lâcher prise qui est sans doute le fruit du temps qui passe inexorablement. »

« La folie me séduit plus que la raison », dite-vous. En ce moment, la raison et les masques régissent nos vies. En souffrez-vous ?

« Cette période est vraiment effrayante et douloureuse pour tant de personnes... Je pense souvent à ceux que l'épidémie a encore plus isolés, comme les malades, les personnes âgées, mais aussi à ceux qui n'ont pas d'autre choix que d'être en première ligne et qui sont dangereusement exposés. »

Comment avez-vous vécu le confinement ?

« J'ai fait un stock de boîtes hermétiques de rangement pour la nourriture car j'ai accueilli une famille de souris voraces. (rires) Je me suis occupée de mes animaux... J'ai patienté comme tout le monde. Bien entendu. Je suis consciente que les conditions de mon confinement m'ont permis de trouver le temps moins long que d'autres. L'atteinte à la liberté n'en reste pas moins une expérience douloureuse, même si elle est nécessaire pour des raisons sanitaires. »

Vous êtes omniprésente lors de la création et des répétitions. Vous êtes toujours aussi engagée sur un show ?

« Oui, toujours ! C'est la moindre des choses. Je suis perfectionniste et je calme mes angoisses dans le travail. Je ne prendrais pas autant de plaisir sur scène si je ne m’impliquais pas autant. Cela me permet d'être libérée au moment de monter sur scène. »

Vous êtes le boss. Est-il plus difficile de s'imposer quand on est une femme ?

« Je ne crois pas non ! (rires) Je me sens responsable devant mon public et, à ce titre, je fais les choix que j'ai envie de défendre devant lui. Les équipes avec qui je travaille le savent et le comprennent. Elles acceptent naturellement mes choix. Le fait que je sois une femme n'y change rien. »

Pensez-vous que la nouvelle génération est « désenchantée », comme vous le chantiez en 1991 ?

« Oui, je le crains. Je pense qu'aujourd'hui, c'est un désenchantement bien plus réel et plus douloureux. J'ai l'impression que plus les années passent, plus ce monde ne nous offre plus l'espoir possible d'un réenchantement. »

En chantant « Sans contrefaçon, je suis un garçon » et en embrassant une danseuse en 1996 à la télé, vous avez participé à ce qu'une nouvelle génération d'artistes se rende plus libre avec la sexualité, le genre. C'est important pour vous ?

« C'était avant tout un acte spontané. Une provocation. Je suis heureuse si cela a pu contribuer à déplacer les limites du politiquement correct mais je ne suis pas certaine qu'un grand vent de liberté souffle sur notre époque où tout est exposé, scruté, commenté, parfois sans filtre ou respect de la personne... La transparence est un diktat. Vivre librement sa sexualité ne devrait malheureusement plus être un sujet. »

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